Carney hausse nos dépenses militaires quelques jours avant l’arrivée de Trump au Canada pour le G7

Guillaume St-Pierre – analyse
OTTAWA | Mark Carney ne doit pas être du genre à arriver les mains vides à un souper entre amis.
Les 9,3 milliards $ de plus en dépenses dans la défense qu’il a annoncés lundi en grande pompe en font foi.
Avec ce montant, le Canada entre dans la zone de respectabilité en matière d’investissements militaires, aux yeux de nos alliés.
C’est-à-dire que nous atteindrons finalement, dès cette année, la fameuse cible du 2% par rapport à la taille de notre économie.
Justin Trudeau prévoyait l’atteindre en 2032 et M. Carney, en campagne électorale, en 2030.
En rapprochant l’échéance, le premier ministre met la table pour le G7, auquel assistera le président américain Donald Trump, qui a lieu dans quelques jours en Alberta.
Mark Carney souhaite sans doute aussi s’offrir un sursaut de crédibilité à temps pour le sommet de l’OTAN la semaine suivante, lors duquel ses membres discuteront de l’idée d’augmenter à 3,5% la cible des dépenses militaires.
Difficile de contourner Trump
Mark Carney signe donc la fin de la récréation. On peut toutefois se demander pourquoi il n’a pas fait cette promesse durant la campagne électorale.
Le Canada s’est toujours perçu comme un pays pacifiste qui pouvait compter sur son grand frère américain pour le protéger. Les dépenses militaires n’ont jamais, historiquement, été très vendeuses auprès de l’électorat.
C’est possiblement pour cette raison qu’on se contente souvent de vœux pieux.
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Mais cette fois, c’est différent, selon Mark Carney qui jure que l’idée est ici de protéger les Canadiens et non de satisfaire les comptables américains et ceux de l’OTAN qui nous tirent l’oreille depuis des années.
Mais personne n’est dupe.
Nos alliés, comme la France, le Royaume-Unis et, oui, les États-Unis, reluquent sans doute déjà nos nouveaux dollars à dépenser en armement.
Dans le panier de nouvelles dépenses figurent environ 2G$ pour trouver de nouveaux partenaires en défense à l’extérieur des États-Unis.
Mais la réalité géographique étant ce qu’elle est, les Américains demeureront nos principaux alliés militaires.
Mark Carney et Donald Trump se livrent à des négociations directes afin d’en arriver à un pacte commercial et de sécurité. Il est difficile de ne pas voir dans l’annonce de nos nouvelles dépenses militaires un outil de négociation, même si ces investissements sont dans les faits bienvenus et nécessaires.
Comme quoi le Canada peut bien essayer d’assumer son indépendance face aux États-Unis, il est difficile de lutter contre sa force gravitationnelle.
Québec se positionne
François Legault, lui, a déjà commencé à se positionner en multipliant hier les annonces en défense. Le signal est clair: Québec veut sa part du gâteau fédéral.
Si Mark Carney s’est bien gardé de présenter son plan de dépenses en défense, c’est peut-être parce qu’il creusera encore plus le déficit déjà prévu d’environ 60G$.
Cela dit, les libéraux affronteront peu de résistance à la Chambre des communes, puisque tous s’entendent pour atteindre la cible du 2%.
Il n’en demeure pas moins que Mark Carney a pris l’habitude de vouloir aller très vite depuis qu’il est premier ministre, quitte à contourner les débats difficiles.
Des débats qui pourraient l’attendre au virage.