Publicité
L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

Carney fait bien de privilégier l’Europe

Getty Images via AFP
Partager
Photo portrait de Antoine Robitaille

Antoine Robitaille

2025-03-15T04:00:00Z
Partager

Je n’irais pas jusqu’à dire «Ça commence bien pour Carney».

D’une part parce que les circonstances l’ont contraint à se bricoler un Conseil des ministres avec ce qu’il avait sous la main. Il a dû tenter de «faire du neux avec du vieux».

Les derniers sondages auraient dû lui permettre de recruter des têtes d’affiche non élues? À l’instar de Jean Chrétien, avec Stéphane Dion. Ou Lucien Bouchard, avec François Legault. Le temps lui a sans doute manqué.

Une certaine idée

Son discours au lutrin, après la cérémonie, comportait de bons éléments.

Après une décennie à entendre le premier ministre fédéral ânonner qu’il «continuait à continuer», il était bon d’entendre un nouveau chef articuler une certaine idée du Dominion.

Exit le post-nationalisme trudeauiste, avec son insupportable supériorité morale et hypocrite: sa prétendue ouverture à toutes les identités occulte de manière commode un creuset essentiellement anglophone.

Carney nous parla plutôt des trois peuples fondateurs – les Premières Nations, la France et les Britanniques – et de l’«identité bilingue» canadienne.

Publicité

Identité

De manière cohérente, c’est en Europe qu’il effectuera sa première mission. Au Royaume-Uni et en France, nos mères-patries, pour employer un terme désuet (mais au fond sympathique).

Les Canadiens français et les Britanniques installés au Canada: deux peuples ayant subi la défaite à la fin du XVIIe siècle. Un siècle plus tard, ils décidaient de se fabriquer une «Amérique du Nord britannique».

Actuellement, le Rest of Canada (ROC) est plongé dans une introspection intéressante. Les insultes annexionnistes trumpiennes le forcent à se demander, après 10 ans de «justintrudeauisme»: mais qui sommes-nous, déjà? Commencer par se reconnecter avec ses racines – de manière raisonnée – n’est pas une mauvaise chose.

Il n’est pas anodin que Carney ait usé du mot «identité», honni par les post-nationalistes, et qu’il ait même osé rebaptiser le ministère du Patrimoine «Culture et identité canadienne».

En temps et lieu

Carney n’ira donc pas à Washington embrasser la bague du président Trump. Il n’a même pas de plan de s’y rendre. Il lui parlera «en temps et lieu».

Dans l’Ouest, cette portion la plus américanisée du Dominion, la décision du nouveau PM libéral passe mal. Le premier ministre saskatchewanais, Scott Moe, l’a intimé à se rendre plus tôt dans la capitale de l’empire états-unien.

En évitant de s’y précipiter, Carney s’évite sans doute un dîner de cons (comme celui réservé à Doug Ford et cie, jeudi), voire une « zelenskyfication » (séance d’humiliation au Bureau ovale).

Les États-Unis, devenus hostiles au Canada et à l’Occident, provoquent une nouvelle «faille atlantique». La dernière fois, c’était en 2003, lorsqu’ils ont envahi l’Irak sous de faux prétextes. Le Canada s’était alors rangé dans le camp français, qui refusait cette invasion illégale.

Cette fois, alors que l’existence du Dominion est en jeu, peut-être que le Royaume-Uni comprendra qu’il doit s’allier à son ancien dominion.

Publicité
Publicité