Ça suffit!

Sophie Durocher
On utilise beaucoup le suffixe « -phobe » en 2023.
Xéno-phobes, islamo-phobes, grosso-phobes, trans-phobes, homophobes, etc. Mais connaissez-vous ce nouveau mot, qui est dans le Robert et le Larousse : nomophobe ?
« Se dit de quelqu’un qui ne peut se passer de son téléphone portable et éprouve une peur excessive à l’idée d’en être séparé ou de ne pouvoir s’en servir ».
Ça vient de l’anglais : no mobile (sans cell).
Et c’est cette maladie, cette phobie, qui explique qu’il y ait autant de spectateurs qui emmerdent tout le monde en gardant leur cellulaire ouvert pendant les spectacles.
ÊTRE OU NE PAS ÊTRE CHIANT
Mercredi, dans ma chronique, je vous parlais de cette pièce de théâtre à laquelle j’ai assisté et où des cellulaires ont sonné à trois reprises. Y’a rien là !, m’a dit Guy Nantel, à QUB radio. Pendant un de ses spectacles d’humour, un cell a sonné dans la salle, le spectateur a répondu et a commenté : « Je suis au spectacle de Guy Nantel. Ouain, c’est pas pire. »
Il y a quelques années, en 2015, le comédien Benedict Cumberbatch a joué Hamlet au théâtre. En sortant de la première, il a tenu à s’adresser aux fans qui étaient venus le voir... pour les engueuler, car il avait vu des cellulaires le filmer toute la soirée.
« Je peux voir les caméras, je peux voir les lumières rouges dans la salle. C’est évident et c’est épouvantable. Il n’y a rien de moins solidaire et de moins agréable pour un comédien que d’être sur scène et de vivre ça. »
- Ne manquez pas La rencontre de l'heure Nantel-Durocher avec Guy Nantel, tous les jours 15 h 00, en direct ou en balado sur les ondes de QUB radio
Cumberbatch était même capable de dire qu’une caméra l’avait filmé à tel siège de telle rangée. Être ou ne pas être un élément perturbateur, telle est la question. Avoir ou ne pas avoir de sens civique, telle est aussi la question.
Mais il n’y a pas que les cellulaires. Il y a aussi ces h$%$% de c@#$%$#$ de t#$%$#$% de petites montres digitales, iWatch et autres, qui s’allument au moindre geste.
Qui a pu imaginer qu’une lumière (ou dix ou quarante) qui s’allume en plein milieu d’une salle plongée dans le noir, ça ne dérangeait pas les gens autour ?
Heille, ça ne vous tente pas de la fermer, votre montre, avant le spectacle ? Avez-vous vraiment besoin de savoir quelle heure il est, combien de pas vous avez faits dans votre journée et quel est le dernier vidéo de chat à ne pas manquer, en plein milieu d’un spectacle ?
PAS MORGANE DE TOI
Il y a un mois, c’était au tour du chanteur Renaud de péter les plombs. Il y a des consignes interdisant de filmer et photographier son spectacle, « à l’entrée de la salle et juste avant le début du concert », précisent les médias français.
Mais en concert à Lille le 22 février, Renaud a interpellé un spectateur qui utilisait son cellulaire, se moquant complètement des consignes. Puis Renaud s’est interrompu en plein milieu d’une chanson pour dire : « Je n’ai plus envie de chanter. Il n’y a pas un voisin qui peut lui dire d’arrêter ? »
C’est ça qu’on va voir de plus en plus. Des comédiens, des humoristes, des musiciens qui interrompent leur spectacle pour engueuler, humilier, ridiculiser les spectateurs fautifs.
Des tas de « nomophobes » à qui on a envie de dire les mots de la chanson de Renaud : « Casse-toi, tu pues, et marche à l’ombre ».