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L'article provient de Bureau d'enquête

Beneva en a assez des factures salées pour certains médicaments

Une plainte a été déposée au Bureau de la concurrence contre un petit groupe de pharmaciens pour des pratiques anticoncurrentielles

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Photo portrait de Éric Yvan Lemay

Éric Yvan Lemay

2025-05-16T04:00:00Z
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Une poignée de pharmaciens auraient accaparé le marché de plusieurs des médicaments les plus chers au Québec, une pratique qui aurait fait exploser le coût des nouveaux traitements.

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Ces médicaments de spécialité peuvent facilement coûter plus de 10 000$ et jusqu’à deux millions $, par patient, par année.

La compagnie Beneva, l’un des plus importants assureurs privés au Québec, a déposé une plainte hier auprès du Bureau de la concurrence du Canada.

Elle reproche à huit pharmaciens de recourir à des pratiques anticoncurrentielles grâce à un accès privilégié à la distribution de certains médicaments de spécialités.

«Cette situation gonfle artificiellement le prix des traitements importants et cause un grand tort à la population québécoise», peut-on lire dans la lettre.

Programmes de soutien

Les patients qui reçoivent ces médicaments sont dirigés vers des programmes de soutien aux patients qui collaborent principalement avec une poignée de pharmaciens. Ces derniers ont développé un système de distribution ultra-efficace, mais qui limiterait la concurrence.

Ils ont notamment mis sur pied des entrepôts, des systèmes de réfrigération pour la conservation et des équipes qui y sont affectées.

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Beneva n’est pas la seule organisation à se plaindre de cette concentration de la distribution de médicaments entre les mains de quelques privilégiés:

– Certains pharmaciens visés ont fait l’objet de décisions disciplinaires de l’Ordre des pharmaciens du Québec, notamment pour du partage d'honoraires illégal et pour avoir obtenu des patients par l'entremise d'un tiers.

– L’Association québécoise des pharmaciens propriétaires (AQPP) a fait une demande de recours collectif qui fait toujours l’objet d’un débat devant les tribunaux (voir autre texte).

– Un pharmacien a été mis à l’amende pour la somme record de 17 millions $ par la Régie de l’assurance maladie du Québec. Il conteste cette décision devant la justice.

Les pharmaciens qui distribuent ces médicaments empochent donc de généreux honoraires, puisque ces derniers sont calculés en fonction du coût du médicament quand ils sont remboursés par des assureurs privés.

100 000$ d’honoraires

Pour un médicament qui coûte un million $ par année, les honoraires du pharmacien pourraient atteindre 100 000$. Le vice-président exécutif en assurance collective de Beneva, Éric Trudel, estime que le montant versé en honoraires devrait être plafonné plutôt que d’être uniquement basé sur un pourcentage de la facture.

Lors du dépôt du recours collectif en juin 2024, l’AQPP estimait que le chiffre d’affaires annuel de chaque pharmacie de médicaments de spécialité atteindrait 310 millions $, contre 7 millions $ pour la moyenne des autres pharmacies.

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Le Regroupement des pharmacies de médicaments de spécialité du Québec (RPMSQ) soutient ne pas avoir reçu de copie de la plainte, mais elle en a été informée.

«Nous sommes étonnés par cette démarche initiée par Beneva. Le RPMSQ aurait souhaité pouvoir s’entretenir avec Beneva afin de discuter ouvertement de la situation avant qu’une telle démarche ne soit mise en place», a indiqué par courriel Valérie Valois de la firme Hill & Knowlton, qui représente le Regroupement.

Pour Johanne Brosseau, consultante et conférencière en assurance médicaments, un grand ménage s’impose.

«Une vingtaine de médicaments sont en train d’amener les régimes [d’assurance] à leur perte», dit-elle. Certains médicaments comme l’Ozempic sont problématiques, puisqu’ils sont largement prescrits et dispendieux.

Elle dénonce elle aussi le petit groupe de pharmaciens qui noyaute la distribution de médicaments de spécialité. Selon elle, les assureurs devraient tenir leur bout pour réduire les montants versés en honoraires.

 

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