Une balade sur le Saint-Laurent permet d’observer des scènes inusitées sur la rive asséchée de Montréal à Repentigny


Louis-Philippe Messier
À Montréal, le journaliste Louis-Philippe Messier se déplace surtout à la course, son bureau dans son sac à dos, à l’affût de sujets et de gens fascinants. Il parle à tout le monde et s’intéresse à tous les milieux dans cette chronique urbaine.
Le niveau d’eau anormalement bas emprisonne des bateaux dans leur marina, mais la nouvelle rive asséchée a libéré un nouveau sentier de promenade qui attire les randonneurs et abrite même déjà un campement d’itinérants.
Le niveau du fleuve a atteint une «bassesse» record de 3,736 m le 18 septembre dernier, soit 71,3 cm de moins que la moyenne, selon le suivi hydrologique fluvial du ministère de l’Environnement du Québec à la station de Lanoraie (qui remonte jusqu’à 1989).
«J’ai eu la précaution de mettre mon bateau à l’ancre au large, avant qu’il se prenne au fond près du quai», se félicite Sébastien Migneault, qui a invité Le Journal à monter pour venir observer la situation dans Pointe-aux-Trembles et à Repentigny.
L'un des rares Québécois à pouvoir se vanter d’être un «résident du fleuve Saint-Laurent», M. Migneault vit dans son bateau à l’année, même l’hiver.
Sa résidence flottante mouille devant le parc Marcel-Léger.

Nouveaux sentiers
À bord d’une chaloupe, nous croisons plusieurs quais à sec, des rampes de mise à l’eau qui n’atteignent plus l’eau... ainsi que des promeneurs de bonne humeur.

«Ça nous crée plein de nouveaux sentiers à marcher sur le bord de l’eau», se réjouit Lynn Burtney, qui se promène non loin de la plage de l’Est avec son conjoint, Robert Bigras.
Plusieurs kilomètres de berge «marchable» ont émergé.
«Les gens se passent le mot, et il y a des dizaines de randonneurs et de familles qui viennent se promener là: c’est une nouvelle destination et une nouvelle activité», commente M. Bigras.
Pierres assassines
Des corbeaux socialisent sur un îlot de pierres au large de l’île au Bois Blanc, non loin de Repentigny.

Un couple à motomarine s’est quasiment tué sur cet obstacle inopiné en pleine nuit, le 10 août.
Sur une nouvelle plage, non loin d’un conduit fluvial, des sans-abri ont érigé un campement de fortune de trois tentes.

Quais grinçants
Les quais de la marina de Repentigny reposent sur le sol, inclinés à environ 15%, et grincent désagréablement sous nos pas.

Plusieurs bateaux sont enlisés.

«C’est quand même la moins pire des marinas des environs, et je peux encore sortir mon petit bateau de pêche ici», confie Luc Hébert.

«Près de chez moi, à Saint-Sulpice, un ponton qui s’est retrouvé sur la terre à 50 m de l’eau... et il a fallu un tracteur pour le sortir de là», me raconte Terry Bélanger, un autre utilisateur de la marina.

À moins d’une hausse du niveau de l'eau, d’autres propriétaires risquent de devoir recourir à la machinerie lourde pour extirper leurs embarcations enlisées avant les temps froids.