Atteint d’un cancer, un septuagénaire de Québec est expulsé de son logement en 15 jours seulement
Le Tribunal administratif du logement (TAL) n’a pas retenu sa condition médicale avec un avis d’éviction rapide


Jean-François Racine
Atteint d’un cancer, un septuagénaire de Québec a été expulsé du logement qu’il occupe depuis 11 ans dans le quartier Saint-Sauveur, avec un délai de 15 jours seulement.
Après une chirurgie en novembre 2024, une médication et plusieurs traitements, Bertrand Cloutier n’a pas été en mesure de se chercher un nouveau logis au cours de l’hiver.
Malgré sa situation, le Tribunal administratif du logement (TAL) n’a pas retenu sa condition médicale avec une conclusion implacable et un avis d’éviction rapide en faveur du propriétaire qui souhaite reconstruire à neuf le bâtiment.
La juge administrative Sophie Lafleur s’est dite sensible au fait que son état de santé se soit dégradé, mais sans y voir un motif suffisant.

Incertitude
L’enseignant à la retraite est renversé. L’audience a eu lieu le 28 avril et deux jours plus tard, le délai légal de 15 jours a commencé à courir.
« C’était ma santé d’abord. J’ai été opéré le 1er novembre et c’était une convalescence de quatre mois. Tout ce monde-là manque de compassion », affirme M. Cloutier, toujours en mesure de se défendre.
Lors du passage du Journal, ce dernier se préparait à quitter les lieux, ne sachant pas trop ce qui l’attend. Son fils pourrait le dépanner temporairement, mais sans plus.
« Je n’ai rien de solide nulle part. Absolument pas. La crise actuelle, je la vis. Il n’y a pratiquement pas de logements abordables », dit-il.
Le 25 mars 2025, le propriétaire demandait l’expulsion du locataire ainsi que celle de tous les autres occupants du logement, en plus de l’exécution provisoire de la décision.
« Le Tribunal conclut que le locataire s’est engagé à quitter le logement au plus tard le 1er mars 2025 et qu’il n’a pas respecté son engagement », peut-on lire.
M. Cloutier est donc devenu un occupant sans droit selon le jugement.
L’homme ne pensait pas se retrouver si près de la rue après avoir travaillé toute sa vie. Il fait un lien avec un documentaire qui donne la parole à ceux qui vivent les contrecoups de la spéculation immobilière à Montréal. L’itinérance n’a peut-être pas de visage.
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Benoit Dutrizac, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
De l'aide
« Dans le film Ma cité évincée, le leitmotiv est que nous sommes tous à deux ou trois étapes de la rue. On ne sait jamais. »
M. Cloutier misait sur le fait que cette démolition prendrait du temps puisque la maison construite vers la fin des années 1880 est classée patrimoniale par la Ville de Québec qui n’a toujours pas accordé le permis nécessaire.
Cet immeuble de la rue Renaud présente un intérêt patrimonial notamment en raison de son « ancienneté et de sa représentativité de maison mansardée typique des faubourgs ouvriers de Saint-Sauveur. » La juge n’a pas retenu cet élément.

En raison du caractère « tragique » de cette expulsion, Québec solidaire a dit souhaiter accompagner le septuagénaire afin qu'il ait toutes les ressources pendant cette période ardue.
De son côté, la Ville de Québec a proposé le Service d’aide à la recherche de logement de l’OMHQ.