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L'article provient de Le Journal de Montréal
Justice et faits divers

Attaqué au «spray» à ours en vendant sa caméra sur Marketplace

Photo Agence QMI, MARIO BEAUREGARD
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Photo portrait de Anne-Sophie Poiré

Anne-Sophie Poiré

2025-04-04T10:30:00Z
2025-04-04T12:49:26Z
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Plusieurs personnes racontent avoir été victimes d’une agression au gaz poivré ou au répulsif à ours lors d’une rencontre avec un faux acheteur de Facebook Marketplace. Alors que cette tactique de vol qualifié gagne du terrain depuis deux ans, la question se pose: devrions-nous user de plus de prudence lorsqu’on vend un bien de valeur sur une plateforme de revente en ligne?

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«Le spray à ours dans les yeux, c’est définitivement la chose la plus douloureuse que j’ai endurée de ma vie et ça prend des jours avant que le mal ne disparaisse», confie à 24 heures Liam, qui a été victime d’une tentative de vol qualifié avec une agression au répulsif à ours. 

«Et c’est sans parler du choc psychologique. Après l’attaque, j’étais toujours en train de regarder au-dessus de mon épaule. Je me méfiais de tout le monde, même des vieilles dames», poursuit l’homme de 28 ans. 

L’automne dernier, il accepte de rencontrer un acheteur potentiel pour sa caméra numérique annoncée à plus de 1000$ sur Facebook Marketplace. 

Il se rend alors à ce qu’il croyait être son adresse, au coin de la rue Saint-Zotique et de la 3e avenue, dans le quartier de Rosemont–La Petite-Patrie, à Montréal. 

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C’est après avoir patienté de longues minutes que l’attaque se déroule. 

«J’étais tanné d’attendre devant la porte. Au moment où j’allais partir, deux jeunes personnes sont arrivées et ont commencé à m’asperger au visage de répulsif à ours. Ils ont volé mon sac à dos qui contenait la caméra», raconte-t-il. 

«J’ai crié à l’aide. Ma copine, qui était partie stationner les vélos BIXI en bas de la rue, est arrivée en courant. Elle a réussi à plaquer au sol celui qui s’enfuyait avec le sac et à reprendre la caméra du même coup», poursuit Liam. 

Les policiers et ambulanciers sont arrivés sur les lieux après un appel d’un voisin. 

«Une personne [suspecte dans l’affaire] a été arrêtée parce qu’elle s’était plainte d’avoir les yeux qui chauffaient à un policier. Elle a dû recevoir des résidus en m’aspergeant. On est attente du procès», précise celui qui a finalement réussi à vendre sa caméra. 

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Vague de révélations

La semaine dernière, un utilisateur de la plateforme Reddit a raconté avoir été attaqué au gaz poivré lors d’un rendez-vous pour la vente d’un iPad près du métro Côte-Vertu. Sa publication a déclenché une vague de révélations. 

Cinq autres personnes ont affirmé avoir subi de telles agressions dans les deux dernières années. 

Et le modus operandi est quasi toujours le même. 

Le vendeur se rend à une adresse fixée par le faux acheteur pour conclure la transaction. Deux jeunes se présentent au domicile qui n’est pas le leur. Pendant que l’un examine l’objet, l’autre attaque la victime avec du gaz poivré ou du répulsif à ours pour ensuite tenter de lui voler l’article. 

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Les produits visés par cette tactique sont généralement «des appareils électroniques ou des montres Rolex», avance James*, qui a été victime d’une telle attaque en juin 2023. 

«J’étais supposé rencontrer une personne à une adresse de maison pour vendre un iPhone neuf, encore dans la boîte, que j’avais annoncé sur Marketplace. Deux jeunes de 15 ou 16 ans sont arrivés par la rue. Pendant qu’un inspectait le téléphone, l’autre a ouvert son petit sac et m’a shooté direct dans la face avec le pepper spray», détaille-t-il en entrevue avec 24 heures

«Ça brûlait, je ne voyais rien, mais je ne voulais pas perdre un téléphone à 1600$. J’ai couru après, je l’ai attrapé et je lui ai fait une clé de bras. Je fais des arts martiaux», explique-t-il. 

Un des deux agresseurs a été interpellé après l’arrivée des policiers. 

L’incident n’a pas freiné James, qui continue de vendre des articles sur Marketplace. Mais il convie désormais les acheteurs dans le stationnement d’un poste de police. 

«Quand les gens refusent, ce n’est pas bon signe», croit-il. 

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Des zones de rencontre sécurisés

Tous les corps policiers contactés par 24 heures sont au fait de cette tactique de vol. 

Depuis 2023, le Service de police de l’agglomération de Longueuil (SPAL) a enregistré sept agressions au gaz poivré commis dans le cadre d'une transaction de bien entre deux personnes, dont deux incidents pour l’année 2025. 

À Laval, des événements semblables sont survenus dans les dernières années. 

La Gendarmerie royale du Canada (GRC) note pour sa part une hausse du nombre de signalements pour ce type de crime, indique la porte-parole de la police fédérale, Marie-Ève Breton. 

Ces délits demeurent toutefois difficiles à quantifier. 

«Il n’existe pas, dans le Code criminel du Canada, d’infraction spécifique pour ces agressions. Ceux-ci rentreraient tout bonnement dans la catégorie générique de vol», précise Mme Breton. 

Pour limiter ces infractions, de nombreux corps policiers du Québec mettent à la disposition des citoyens des «zones de rencontre neutres» dans les stationnements des postes de quartier. 

Ils sont les seuls endroits réellement sûrs pour procéder à l’échange de biens de valeur vendus en ligne, selon les utilisateurs de Reddit qui s’adonnent à ce commerce. 

Le Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) compte 17 de ces zones d’échanges sécurisées, qui sont surveillées par caméra et disponibles 24 heures sur 24, sept jours sur sept.

*Le prénom de la présumée victime a été modifié à sa demande pour des raisons de sécurité.

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