Ardisson et Guy A. Lepage font la paire


Guy Fournier
En France, aucun média n’a songé à associer le nom de Guy A. Lepage à celui de Thierry Ardisson, mais au Québec, c’est difficile dissocier l’un de l’autre.
Guy A. Lepage n’est pourtant pas inconnu dans l’Hexagone. Sa série de télévision Un gars, une fille, interprétée brillamment par Alexandra Lamy et Jean Dujardin, marqua pendant quatre ans le début du prime time de France 2. Quelque 438 épisodes de six minutes firent de Chouchou (Alexandra) et de Loulou (Dujardin) le couple télévisuel le plus célèbre de France.
Même si Un gars, une fille connut au Québec un succès remarquable, c’est à Tout le monde en parle que Guy A. devra sans doute sa renommée. L’increvable émission du dimanche soir n’est pourtant qu’une adaptation du talk-show original imaginé par Thierry Ardisson en 1999. Là-bas, le talk-show n’a pas connu la même longévité qu’au Québec. Après huit saisons, France 2 a «tiré la plogue», alors qu’à Radio-Canada, TLMEP entreprendra en septembre prochain sa 22e saison.
Jusqu’à quel point Ardisson et Lepage se ressemblent-ils? En France, celui qu’on a fini par surnommer «l’homme en noir» parce qu’il était toujours vêtu de noir, avait la réputation d’être un fieffé provocateur. Il l’est resté jusqu’à sa mort. Quant à Guy A., il est plus insolent que provocateur, comme l’ont souvent démontré ses coups de gueule toujours ponctués d’un juron. Si les deux animateurs sont aussi des créateurs, Ardisson fut sûrement celui qui fut le plus motivé par le désir de sortir la télévision des sentiers battus.
Une émission controversée
L’une des dernières créations d’Ardisson, Hôtel du temps, fait revivre, grâce à deux applications de l’intelligence artificielle (Face Retriever et Voice Cloning), des vedettes décédées (Coluche, Dalida, Jean Gabin). L’émission a eu plus de détracteurs que d’admirateurs. Mais le principe même du deep fake qu’elle exploite sera sûrement repris et poussé beaucoup plus loin.
Malgré ce que l’on pourrait croire, Ardisson, qui pouvait poser à ses invités, même à un ancien premier ministre, des questions «qui ne se posent pas», prenait soin d’éviter de dire des choses qu’il pourrait regretter. Même s’il ne s’excusait jamais – Guy-A. non plus –, Ardisson n’en a pas moins jugé qu’il devait le faire après avoir comparé Gaza à Auschwitz dans une émission de Léa Salamé.
Un exemple à suivre?
C’est peut-être l’exemple que finira par imiter Guy A. Lepage dont les premières années de TLMEP ont blessé plus d’un invité, la romancière Nelly Arcan n’étant pas la moindre. Dany Turcotte, longtemps son fou du roi, a compris, lui. Il s’est excusé auprès de Mamadi Camara après sa remarque déplacée sur le cellulaire du pauvre homme lors de son arrestation.
Je connais plus Guy A. Lepage que Thierry Ardisson, que j’ai rencontré seulement deux fois. L’un et l’autre me semblent des êtres angoissés et solitaires, plus sensibles, j’ose croire, que l’image publique qu’en transmet la télévision.