Après son élection dans une partielle en Alberta, la véritable croisade de Poilievre commence
Cette victoire prévisible n’a pas fait oublier à plusieurs militants conservateurs la lourde défaite encaissée lors du dernier scrutin fédéral


Karine Gagnon
La victoire écrasante du chef conservateur Pierre Poilievre dans une partielle en Alberta était tout sauf imprévisible. Et c’est maintenant que débute sa véritable croisade.
Battu dans Carleton lors des élections fédérales d’avril, une circonscription qu’il représentait depuis 20 ans, Pierre Poilievre s’était organisé pour revenir siéger à la Chambre des communes.
Le chef conservateur avait en effet, on s’en doute, choisi un château fort où il était certain d’être élu. Il l’a emporté avec 80% des voix, ce qui n’a rien de surprenant.
Mais cette victoire prévisible n’a pas fait oublier à plusieurs militants conservateurs la lourde défaite encaissée lors du dernier scrutin fédéral. Un revers survenu alors que le PCC menait avec une confortable avance dans les sondages jusqu’à l’arrivée de Mark Carney.
Plus qu’un toupet
Le principe d’alternance des pouvoirs, qui aurait dû porter les troupes conservatrices à la tête du pays après une décennie libérale, n’a même pas porté ses fruits.
Et il apparaît clairement que le chef, à part dans l’ouest, ne passe pas dans bien des régions du Canada, dont le Québec.
Lors de la dernière campagne, Pierre Poilievre avait changé de style dans l’espoir d’élargir son électorat.
Il faut vraiment prendre les contribuables pour des cons pour croire qu’ils vont juger le candidat le plus apte à devenir le prochain premier ministre sur la courbe de son toupet ou de ses biceps dans ses t-shirts.
Probablement que l’équipe conservatrice a confondu les standards des réseaux sociaux avec l’électorat et ses attentes. Ce sont pourtant deux mondes complètement différents, et heureusement d’ailleurs.
Il faudra plus aussi que le départ de Jenni Byrne comme directrice de campagne des conservateurs aux prochaines élections.
Au lendemain des dernières, le spin conservateur voulait que celle-ci était responsable de la défaite parce qu’on n’avait pas su réaligner le discours face à la menace de Trump.
Il est trop facile de tout imputer à cette femme. Le chef d’un parti approuve évidemment toutes les orientations et stratégies en prévision d’une campagne et pendant son déroulement.
Pas le poids
Ce que la majorité des gens recherchent avant tout, de la part d’un futur premier ministre, c’est un discours rassembleur et une vision.
Dans le contexte actuel, les électeurs étaient aussi en quête d’une tête forte qui serait en mesure de faire face à l’imbuvable président Donald Trump.
Pierre Poilievre ne faisait pas le poids, comme en a témoigné la victoire du successeur de Justin Trudeau à la tête des libéraux.
De nombreux experts ont mis en lumière, depuis les élections d’avril, le fait qu’aucun rival ne s’est jusqu’à maintenant profilé pour succéder à Poilievre. Mais, devant le leadership très contesté du chef, il ne serait pas surprenant que des noms émergent.
Le vote de confiance en Pierre Poilievre aura lieu en janvier. Il y a, au sein du parti, des gens très intelligents qui pourraient avoir envie de recentrer celui-ci.
Il s’agit d’une manœuvre très ardue, et l’ancien chef Erin O’Toole l’a appris à la dure. Le contexte actuel – et la volonté d’éviter les dérives observées chez les Américains – pourrait cependant en fournir l’impulsion nécessaire.
Maintenant qu’il a été élu en bonne et due forme, Pierre Poilievre pourra jusqu’à nouvel ordre continuer de tirer vers le bas la politique canadienne.
Mais, si j’avais à parier, je me rangerais chez ceux et celles qui croient que les conservateurs sont condamnés à demeurer dans l’opposition tant qu’ils seront dirigés par cet énergumène.