Fin de la livraison à domicile, délais plus longs: Ottawa annonce un énorme coup de barre à Postes Canada

Guillaume St-Pierre
Fin de la livraison à domicile, délais plus longs, fermeture de bureaux ruraux: Ottawa ordonne une réforme de Postes Canada, provoquant une grève générale illimitée des postiers, sans contrat de travail depuis deux ans.
Rien ne va plus à la société d’État, qui accumule les pertes financières massives en plus d’être aux prises avec un conflit de travail qui s’éternise.
Ottawa a annoncé jeudi un train de mesures visant à redresser la barre.
«C’est un message clair qu’il y a des limites à notre capacité de sauver Postes Canada année après année et elle doit montrer un chemin clair vers la viabilité financière», a déclaré hier le ministre de la Transformation du gouvernement, des Travaux publics et de l’Approvisionnement, Joël Lightbound.
Dépassée par la concurrence du privé, la société d’État a accumulé depuis 2018 plus de 5 G$ en pertes et elle se dirige vers un trou de 1,5 G$ cette année, au rythme de 10 M$ par jour en coûts d’exploitation seulement.
Le syndicat des travailleurs de Postes Canada (STTP) n’a pas mis de temps à témoigner de sa colère, déclenchant une grève générale d’un bout à l’autre du pays, a confirmé à TVA Nouvelles Renaud Viel, le président de la section locale de Montréal.
Pas une grande perte
Le plan de sauvetage de Postes Canada du fédéral prévoit la levée du moratoire imposé par le gouvernement de Justin Trudeau en 2015 sur la conversion de quatre millions d’adresses postales restantes vers des boîtes communautaires.
Ce changement à lui seul permettrait d’économiser 400 M$ annuellement. Les changements seront effectués en grande partie d’ici quatre ans, a-t-il précisé.
Postes Canada continuera de livrer les colis et le courrier chaque jour, mais le service sera plus lent.
Pour le courrier envoyé au Canada, le délai normal passera de deux à quatre jours à jusqu’à une semaine, avec un minimum de trois jours de transit. Le courrier «non urgent» transitera par camion au lieu des airs, pour des économies prévues de 20 M$ par année.
«C’est dommage, j’ai toujours reçu mon courrier chez moi», a réagi Claire Saint-Louis, une résidente de Charlesbourg, à Québec, à sa sortie d’un comptoir postal à Limoilou. C’est un changement, alors on va s’adapter. De toute façon, on reçoit moins de courrier qu’avant», a-t-elle ajouté.
Des succursales en péril
Le fédéral veut aussi lever le moratoire qui protège près de 4000 succursales de Postes Canada en région depuis 1994, dont 958 au Québec. Sur ce lot, les employés de 101 bureaux bénéficient d’une convention collective.
C’est donc 847 bureaux qui se retrouvent sur la liste des bureaux de poste en danger après l’annonce du fédéral.
Pour les plus petites municipalités du Québec, la nouvelle est tombée comme une tonne de briques.
«On se bat pour garder tous nos services. On se bat pour le médecin, pour notre dépanneur, pour la caisse populaire. Et puis là, on va se battre encore», tonne Pierre Bossé, maire de Lac-des-Aigles, au Bas-Saint-Laurent.
«Le fédéral garroche son argent par les fenêtres, mais quand c’est le temps de donner des services aux citoyens, ce n’est pas important», ajoute-t-il.
À couteaux tirés
Cette réforme survient au moment où le syndicat des travailleurs de Postes Canada (STTP) est en négociation pour le renouvellement de son contrat de travail depuis bientôt deux ans.
La direction de Postes Canada a sans surprise accueilli favorablement les changements proposés par le gouvernement Carney.
Le ministre Lightbound a rejeté l’idée d’imposer un arbitrage à court terme.
– Avec Gabriel Côté et Louis Deschênes
La débandade de Postes Canada en chiffres
– 5,5 milliards de lettres traitées en 2006 par rapport à 2 milliards en 2025.
– 20% en volume de colis livrés entre 2023 et 2024.
– 9,3% en volume de courrier traité entre 2023 et 2024.
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