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Culture

Anick Lemay se confie sur les séquelles de son cancer

Animée par la reconnaissance, elle a accepté de devenir porte-parole de la Maison Rose, la toute première en Amérique du Nord, qui offre une gamme de services aux femmes atteintes ou survivantes d'un cancer du sein.

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Michèle Lemieux

2025-05-19T10:00:00Z
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Il y a sept ans, Anick Lemay recevait un diagnostic de cancer du sein. Même si cette épreuve est désormais derrière elle, la comédienne vit toutefois avec des séquelles au quotidien. Animée par la reconnaissance, elle a accepté de devenir porte-parole de la Maison Rose, la toute première en Amérique du Nord, qui offre une gamme de services aux femmes atteintes ou survivantes d’un cancer du sein.

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Anick, je présume que vous n’avez pas réfléchi longtemps, quand on vous a approchée pour vous confier le mandat de porte-parole de la Maison Rose?

J’ai eu beaucoup de demandes depuis que j’ai été malade, mais j’ai dit non à tout. J’avais besoin de prendre un pas de recul. Je ne voulais plus être associée au cancer. Je voulais sortir de cette époque-là de ma vie... Finalement, je me suis rendu compte qu’on ne s’en sort jamais vraiment. (rires) Je ne parle pas pour les autres, je ne parle que pour moi. C’est ma réalité. La Maison Rose est un lieu qui est beau, réconfortant, accueillant, et qui offre une multitude de services. Il y a même une garderie sur place. Les mamans pourront profiter d’un petit moment rien qu’à elles. Ici, on n’est pas dans l’apitoiement. On est dans la solution. On est dans la lumière.

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Est-ce qu’accepter cette proposition était pour vous une manière de démontrer votre reconnaissance?

Oui, «reconnaissance» est le bon mot. C’est vraiment ce que je ressens. La Maison Rose est un lieu extraordinaire dont je pourrai profiter moi aussi, même si ça fait sept ans que j’ai eu le cancer. Je ne trouve pas toujours de cours de yoga ou de Pilates adapté à ma condition. J'en fais quand même, mais je suis souvent l’«handicapée» de la gang, si j’ose dire, parce que je n’ai plus le corps que j'avais. Physiquement, je suis hypothéquée. À la Maison Rose, on offre des cours de yoga adaptés. On offrira aussi des services d’acupuncture. Ce sont des traitements qui coûtent généralement une centaine de dollars tandis qu’ici, ils seront gratuits.

Que voulez-vous dire par «hypothéquée»?

On a procédé à la reconstruction de mes deux seins. J’ai reçu deux prothèses. Comme ma peau et mon muscle ont brûlé pendant les traitements de radiothérapie, il a fallu qu’on prélève le grand dorsal et qu’on le transpose sur ma poitrine pour attacher la prothèse. C’est courant comme chirurgie, mais dans mon cas, ça ne s’est jamais replacé. Comme il manque un muscle dans mon dos, je suis moins forte. Et j’ai toujours un anneau qui me serre, et ce, depuis la première opération.

Est-ce une conséquence de l’opération?

Oui. Au moment de la reconstruction mammaire, quand on a implanté mes seins et qu’on a mis des expanseurs sous mes pectoraux, mon corps s’est raidi et ne s’est plus jamais détendu. Il n’y a jamais eu de relâchement. J’ai vraiment le sentiment d’avoir un corset en permanence. Quand je reçois un traitement en acupuncture, je ressens une détente pendant deux ou trois jours. Au niveau de mon bras, une petite bosse s’est formée. On m’avait enlevé 32 ganglions dans le bras... J’ai toujours les doigts engourdis. Je dois donc étirer mon bras, faire des exercices. Ça m’a coûté très cher de physio, car je ne voulais pas risquer d’avoir un lymphœdème, parce que c’est ce qui m’attendait. Alors mon bras fait mal, mais j’ai appris à drainer la lymphe. Je dois l’activer. La douleur est cela dit toujours présente.

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Vous êtes donc en forme, en santé, mais vous vivez avec des séquelles, si je comprends bien?

Oui. Je fais moins de traitements de toutes sortes parce que mon compte de banque ne suit pas... (sourire) Puis, il y a eu un moment où j’ai été tannée de me soigner. Honnêtement, je dirais que ça fait au moins deux ans que je ne fais plus de soins adaptés à ma condition. Je me les fais moi-même. Tout cela pour dire que je vais grandement apprécier les soins gratuits qui me seront proposés par la Maison Rose.

Finalement, on sous-estime les séquelles du cancer du sein...

Effectivement, car même si une femme est guérie du cancer du sein, on ne sait pas tout ce qu’elle vit par la suite. Ça va bien au-delà de la perte de cheveux ou de la face de lune, qui est une conséquence de la prise de cortisone. Il y a tout le reste, et ce «tout le reste» est beaucoup plus violent.

Après sept ans, est-ce que la peur que la maladie revienne sestompe lentement?

Oui. Je pense que c’est très différent pour chaque personne. Au sortir de mes traitements, je pensais à la récidive aux demi-heures. J’avais continuellement peur. Au bout d’un an, c’était peut-être une fois par jour. Au bout de deux ans, une fois par semaine. Au bout de trois ans, une fois par mois. J’ai deux amies en récidive de cancer, qui en sont au stade 4. Elles vivent bien quand même, nous sommes vraiment là pour elles, mais c’est long avant que la peur s’estompe. Ça revient tout le temps. Dès que quelque chose semble anormal, le sol se dérobe sous mes pieds. Je ne pense plus au cancer au quotidien, mais dès que j’ai un petit bobo, ça me revient en tête.

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Le fait d'être maman ajoute-t-il au stress?

Tout à fait. On ne peut pas mourir quand nos enfants sont petits. Moi, avant d’être mère, j’adorais les montagnes russes, les manèges. À partir du moment où j’ai eu ma fille, j’ai commencé à avoir des vertiges, comme si mon corps me disait de ne pas faire ça parce que c’était dangereux. Je pense que c’est une forme de protection. Simone est rendue à 18 ans. Elle est super, c'est une belle jeune femme. Je ne veux pas mourir, ça va de soi, mais on dirait que plus le temps passe et plus je me sens calme sur ce plan, car ma fille est forte, autonome et elle a confiance en elle. Je pense que j’ai bien fait ça... (sourire) L’annonce est importante et la manière de le faire n’est pas du tout anodine. Elle peut avoir de grandes répercussions. La façon d’annoncer la maladie peut faire une différence dans la vie des enfants. Il faut être vraie, le moins dramatique possible et accueillir les questions. Il faut attendre d’être assez forte. D’ailleurs, en plus de tout le reste, la Maison Rose offrira aussi un service d’accompagnement.

En terminant, qu’avez-vous au programme, au niveau professionnel?

Je serai de la téléréalité Aller simple. Ç’a été très agréable. J’ai eu beaucoup de plaisir à faire ça. L’été dernier, j’ai tourné Anticosti, de Guy Édoin et Dominic Goyer, une minisérie en six épisodes pour Série Plus. Nous avons tourné à Anticosti, alors je me considère vraiment très chanceuse. Sinon, j’écris toujours ma série pour Radio-Canada, et nous devrions terminer le film Villeneuve cet automne.

Pour s’informer sur la Maison Rose, on se rend au https://rubanrose.org/. On peut relire les chroniques d’Anick sur le cancer au www.urbania.ca ou se procurer son livre Le gouffre lumineux.

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