Anglade : une démission tardive, mais sage

Josée Legault
En quittant la chefferie du Parti libéral du Québec, Dominique Anglade a pris la bonne décision. Son réveil est certes tardif. Son annonce d’hier s’est néanmoins faite avec dignité.
Après avoir livré la pire défaite du PLQ depuis sa fondation en 1867, son entêtement à s’enferrer dans le déni prenait en effet des airs de mauvais vaudeville.
Il fallait mettre fin au supplice.
Face à la popularité tenace de la CAQ et de François Legault, personne ne s’attendait pourtant à une victoire du PLQ. Le vrai problème de Mme Anglade était ailleurs.
Il résidait dans ses trop nombreux virages, sa campagne désorganisée, ses troupes démoralisées et l’effondrement catastrophique du vote libéral chez les francophones.
Pis encore, son refus de partir menaçait de priver son parti du temps précieux dont il aura besoin pour se reconstruire le moindrement.
À preuve, la voyant s’accrocher, pour lui faire comprendre le message, des libéraux notoires ont même dû l’attaquer durement par médias interposés.
Du jamais-vu au PLQ.
Bref, seule une humiliation cuisante l’attendait à son vote de confiance prévu d’ici un an.
La situation était intenable. Avec son départ, les libéraux sont enfin soulagés. Ils n’auront cependant plus droit à l’erreur.
La quête
La quête d’une ou d’un nouveau chef sera leur priorité.
Or, s’ils croient pouvoir dénicher LE sauveur capable à lui seul de les extirper du purgatoire dans lequel ils végètent depuis leur autre défaite cinglante sous Philippe Couillard, ils se tromperaient royalement.
Le PLQ a non seulement besoin d’une « nouvelle administration », mais d’une vaste opération audacieuse de remue-méninges.
On a beaucoup dit qu’à l’instar du PQ, le PLQ est tout d’abord la victime de la disparition de l’axe fédéraliste-souverainiste, dont la CAQ est l’ultime bénéficiaire. C’est vrai, mais seulement en partie.
La réalité est que le PLQ, né en 1867, savait comment exister – et prendre souvent le pouvoir –, bien avant la création du PQ en 1968 et l’apparition de la « menace séparatiste » dont il faisait depuis ses choux gras.
Se reconnecter avec ses valeurs
Parti des anglophones, des libertés individuelles et du milieu des affaires, souvent, il n’en fut pas moins aussi celui du progrès social, des droits des femmes, du nationalisme économique et linguistique, etc.
Le PLQ fut le moteur de la Révolution tranquille.
Sous Robert Bourassa, il fut même le géniteur de la charte québécoise des droits, de grands combats constitutionnels et de la première loi faisant du français la langue officielle du Québec.
On ne refait évidemment pas l’histoire.
La dynamique politique a beaucoup changé depuis. Les régimes Charest et Couillard-Barrette furent nettement moins glorieux.
Dans les dossiers identitaires et économiques, la CAQ occupe aussi maintenant tout le terrain.
On mesure donc l’ampleur phénoménale des travaux de refondation qui attendent le PLQ s’il veut éviter de se faire doubler par Québec solidaire.
Quant à sa ou son prochain chef, les « sauveurs » se feront peut-être rares.
En même temps, tous les partis savent que la question du « qui » les dirige est aussi d’une importance déterminante.
Qui se pointera au PLQ ? S’il plongeait, l’ex-ministre Pierre Moreau partirait sûrement avec une longueur d’avance.
Maintenant que l’avenir est ouvert, qui sait qui viendra sonner à sa porte ?