André Arthur: «la Formule 1 de la communication»
Le décès de l’ex-animateur vedette de radio André Arthur suscite de nombreuses réactions à Québec

Dominique Lelièvre
André Arthur croyait fermement que « t’as pas le droit d’être plate à la radio ». Il n’aura pas déçu à cet égard jusqu’à la fin de sa carrière, même s’il ne faisait pas toujours dans la dentelle, disent les gens qui l’ont connu.
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« Arthur était une Formule 1 de la communication, mais il manquait de freins dans les virages serrés », illustre sa fidèle collaboratrice pendant une dizaine d’années à CJRP et à CHRC, Myriam Ségal.
Il pouvait donc lui arriver de déraper, « mais les gens lui pardonnaient, et lui, il faisait confiance au jugement de ses auditeurs. Il se disait que s’ils n’aiment pas ça, ils vont s’en aller », affirme-t-elle.

En pleine maîtrise
Le décès de l’ex-animateur vedette, dimanche, a secoué le monde de la radio et suscité de nombreuses réactions.
Irrévérencieux à souhait et en pleine maîtrise de son média, André Arthur n’avait pas peur de ses opinions ni de les défendre jusqu’au bout, ce qui lui a parfois attiré des ennuis.
Ceux qui l’ont connu lui reconnaissent un « talent inné » de communicateur, de raconteur et de vulgarisateur, doublé d’une grande intelligence.
« C’est l’animateur qui m’a tout montré de mon métier » et « un modèle en matière d’entrevue », indique Mme Ségal. « Il avait vraiment l’art de faire parler l’autre ».
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« Un sens du timing exceptionnel »
« Il avait un sens du timing exceptionnel sur la manière de dire les choses [...]. Tu ne quittais pas pendant la pause pour aller voir ce qui se passait dans les autres postes parce qu’Arthur t’avait comme gardé accroché, un peu assis sur le bord de ta chaise », affirme l’animateur de radio Stéphane Gasse.
« Bon, évidemment, des fois, avec un style qui n’avait pas de maudit bon sang et des affaires qui ont été dites, qui n’ont pas d’allure », lance celui qui a côtoyé Arthur à CJMF de 1998 à 2001, puis à CHOI et BLVD.

Noir ou blanc
« Il ne faisait pas dans la nuance, c’est le moins que l’on puisse dire. C’était blanc, c’était noir, il n’y avait pas de nuance de gris avec André Arthur, c’est ce que les auditeurs appréciaient », souligne Nathalie Normandeau, qui le recevait pour des chroniques dans son émission lorsqu’ils officiaient à BLVD à Québec.
M. Arthur a été congédié de cette station en 2018 après avoir qualifié dans son émission la rue Saint-Jean de « boulevard sida ».
« On était souvent en désaccord, mais c’était correct, c’était comme ça. Lui, c’était lui, moi, c’était moi », convient l’ancienne vice-première ministre, qui ne conserve pas moins « un souvenir extrêmement précieux et positif de [sa] collaboration avec André Arthur ».

Au tournant des années 1980, le « roi des ondes » faisait la pluie et le beau temps à Québec à titre de morning man le plus écouté.
« Il était absolument sans compromis dans sa vision de faire de la radio » quitte à ce qu’il « y ait des gens écorchés au passage », remarque Alain Dufresne, directeur du Collège radio télévision de Québec.
« Lui, ce qu’il disait essentiellement, c’était : “T’as pas le droit d’être plate à la radio” », pointe-t-il. Un mantra que plusieurs de ses collaborateurs ont entendu.

Proximité avec son public
La sénatrice Josée Verner note de son côté la « proximité » qu’André Arthur avait avec son public, ce qui lui a bien servi pour devenir l’un des rares députés indépendants du Québec à se faire élire au fédéral.
« Il avait bien saisi la dynamique de son comté (Portneuf–Jacques-Cartier) », dit-elle à propos des élections de 2006 et 2008 qui l’ont amené à la Chambre des communes.
Au plan humain, « c’était un vrai gentleman », ajoute celle qui avait gardé contact avec l’homme de radio.
Un homme « intègre et intense »
« C’était un homme intègre et intense et il a vécu de façon intègre et intense. Il avait un respect profond pour l’auditoire. »
– Myriam Ségal, animatrice à la retraite
« C’est un monument de la radio qui s’en va. C’était peut-être le plus grand communicateur en radio, qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas. »
– Bruno Perron, qui a collaboré avec André Arthur sur les ondes de CHRC dans les années 90
« Je ne suis pas comme lui du tout, par contre il m’a amené à voir les choses différemment et ç’a toujours été bénéfique pour moi. »
– Stéphan Dupont, qui a travaillé avec André Arthur à CKNU
« Arthur fait partie des gens qui ont transformé le métier, pour le meilleur ou pour le pire. On peut clairement dire qu’avant Arthur, la radio se faisait d’une façon et après Arthur, elle s’est faite d’une façon différente. [...] Je pense que ça a donné une grande liberté à beaucoup d’animateurs. »
– Alain Dufresne, directeur du Collège radio télévision de Québec
« Il s’est rendu compte que si tu sollicitais l’animosité, l’agressivité, le ressentiment de la population en général, tu pouvais faire un formidable feu d’artifice avec ça. »
– Claude Thibodeau, analyste et ancien copropriétaire de CJMF
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