Amazon nous force à penser en dehors de la boîte


Isabelle Maréchal
Amazon se fiche de l’humain derrière les colis. L’important, c’est qu’il livre. Vite et sans se plaindre. Tentative de syndicalisation dans un entrepôt? On ferme la shop! La multinationale américaine n’a pas traîné à enlever son logo des sept centres de distribution qu’elle va fermer au Québec. Assez pitoyable pour les 1700 employés qui vont devoir faire leurs boîtes et se trouver une job ailleurs.
Avouez que ça nous force à réfléchir à notre rapport malsain avec ce monstre qu’est devenu Amazon. Arrêtons de nourrir la bête. Elle est en train de nous avaler tout rond.
On n’est pas des robots
Nous avons la responsabilité de réagir à ce claquage de porte sauvage. Cessons d’être admiratifs d’un modèle d’affaires qui considère les travailleurs comme une ressource remplaçable, interchangeable, sans grande valeur. Dénonçons cette mentalité d’abuseur.
On sait tous qu’Amazon traite mal son monde et lui impose des conditions de travail insoutenables. Que le travailleur doit suivre une cadence infernale, au risque de se briser le dos ou le moral. Que s’il ralentit, il doit mettre les bouchées doubles, sinon la machine va l’éjecter comme un malpropre. On le sait, tout ça. L’entreprise sait qu’on le sait. Ça ne la dérange même pas.
Nous avons échangé notre pouvoir citoyen contre de la commodité. À consommer sans conscience, on trace le chemin de notre propre exploitation. On justifie nos achats sur Amazon par des économies de temps et d’argent. Dans le fond, on est un peu paresseux, individualistes, dépendants de nos petites livraisons à domicile.
Au lieu de continuer d’enrichir ce géant, on devrait plutôt défendre la dignité des travailleurs à faible revenu. Clamer que c’est la faute des syndicats, que les employés n’avaient qu’à rentrer dans le rang et s’estimer chanceux, c’est ignorer le fond du problème: la déshumanisation du travail. Attendez que l’IA débarque pour vrai!
Reprendre le contrôle
Qu’elle le veuille ou non, Amazon devra faire face à la musique: ses milliers d’employés partout sur la planète s’organisent pour de meilleures conditions de travail.
Appuyé par la CSN, les Teamsters, ou UniGlobal qui représentent plus de 20 millions de travailleurs dans 150 pays, le mouvement est lancé. Il n’en tient qu’à nous qu’il ne s’essouffle pas.
J’espère vous convaincre d’y penser à deux fois avant de commander en ligne sur Amazon. Résister, un achat à la fois, c’est un choix à notre portée. C’est faux de dire que les boycottages ne servent à rien. Au contraire, ils affirment nos principes et brandissent nos valeurs. Soutenons les commerçants qui respectent leurs employés. Délaissons Amazon qui ne mérite pas notre fidélité.
Exigeons la même chose de nos gouvernements. Qu’ils cessent de plier devant ses grosses boîtes qui usent de chantage économique. Amazon dicte ses règles et en retour, nos bons gouvernements lui offrent de généreux contrats, sans en évaluer les risques. Ça suffit. Donnons l’ordre à tous les ministères de rayer Amazon de sa liste de fournisseurs. C’est possible de tenir tête à la bête. Si tout le monde s’y met... imaginez l’effet. C’est Jeff Bezos qui serait bluffé!