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L'article provient de Le Journal de Montréal
Affaires

Aéroport Montréal-Trudeau: dans 10 ans, ce sera pire

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Photo portrait de Francis Gosselin

Francis Gosselin

2025-07-17T04:00:00Z
2025-07-17T04:10:00Z
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J’ai bien ri en voyant ce projet d’investissement d’un nouveau 10 G$ dans l’aéroport Montréal-Trudeau afin, nous dit-on, de le «débloquer».

Je prends l’avion régulièrement depuis que j’ai 16 ans, et de mémoire, je ne me souviens pas que ce fût une expérience agréable. Je ne me souviens pas qu’il ait été autre chose qu’en chantier.

Une trentaine d’années plus tard, le nombre de passagers et les revenus ont bien augmenté, mais aucun des problèmes historiques n’a été réglé.

Plus de monde. Plus de moyens. Pire expérience.

Béton inc.

Ces dernières années, les centaines de millions investis à faire et refaire et rererefaire les échangeurs autour de l’aéroport n’ont pas eu raison des embouteillages monstres dans les voies d’accès qui mènent au terminal.

Certains passagers descendent de leur taxi et marchent le dernier kilomètre, à pied.

Montréal, ville moderne

L’engorgement est tel qu’en revenant d’un voyage récemment, dans un 777 en provenance d’Europe, les 350 passagers ont dû descendre à pied, puis par autobus. C’est, me dit-on, de plus en plus fréquent.

On a le sentiment, quand on pense à YUL, d’un aérodrome régional qui serait victime de sa popularité.

En permanence.

Les dirigeants, bien mal pris, imaginent que de couler du béton est la solution à tout. Génération après génération, on en aura coulé, du béton, à Dorval.

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Ainsi, le «grand déblocage» annoncé ces jours-ci est une promesse: pour 10 ans encore, ce sera le bordel. Après, on verra.

Je vous fais un petit pari: dans 10 ans, ce sera pire.

• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Francis Gosselin, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :

Un problème de gouvernance

Ce que vit Montréal-Trudeau est la conséquence d’un choix politique datant des années 90 où le gouvernement fédéral a transféré la responsabilité des aéroports à des OBNL tout en se gardant de leur transférer aussi les terrains.

Il est ainsi devenu un locateur gourmand qui affame les opérateurs.

En choisissant d’en faire des OBNL, il a aussi privé ces organismes du principal vecteur de développement économique moderne: le capital! Ainsi, en l’absence d’investisseurs, il faut, encore et toujours, quémander aux banques publiques comme la Banque de l’infrastructure du Canada (BIC) de nouveaux prêts à taux avantageux.

C’est, pour dire autrement, un problème de gouvernance.

La vache à lait

En procédant ainsi, le gouvernement fédéral a fait son choix. Plutôt que de faire des aéroports canadiens des véhicules de développement économique et d’attractivité, il en a fait de vulgaires vaches à lait.

Et les a donc astreints au régime sec.

Le problème ne date donc pas d’hier.

L’incapacité de l’aéroport Montréal-Trudeau de décider de sa propre destinée et de lever son propre financement sera éternellement un obstacle à sa grandeur.

Tant que nous ne prenons pas cet enjeu de front, et que nous continuons d’endetter à coups de milliards nos aéroports sans en transformer radicalement le fonctionnement, nous allons réparer les fissures avec de la gomme.

Le regretté Michel Nadeau aimait rappeler cette contradiction: un organisme voué au développement économique qui n’a pas les moyens de lever des capitaux, dont les administrateurs se nomment entre eux et dont la contribution à l’économie nationale n’est qu’un objectif secondaire est voué à la médiocrité.

Avec les tarifs aéroportuaires les plus élevés au pays, un terminal vieillissant et des infrastructures constamment en rénovation depuis des décennies, il n’est pas étonnant que Montréal se classe parmi les pires aéroports en Amérique du Nord, selon l’enquête JD Power.

Aucune quantité de béton ne parviendra à changer cela.

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