Actrice créée par l’intelligence artificielle: c’est la panique chez les artistes, selon l’UDA

Cédric Bélanger
La création par l’intelligence artificielle d’une actrice capable de jouer dans des films ou des jeux vidéo fait monter la crainte des artistes québécois d’être remplacés par des machines, dénonce la présidente de l’Union des artistes, Tania Kontoyanni.
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Le niveau d’inquiétude au sein des membres de l’UDA, a-t-elle affirmé lors d’un entretien avec Le Journal, «est énorme».
«Nous ne sommes plus dans l’inquiétude comme en 2023, nous sommes, j’ose le mot, dans une panique. Les gens se disent: il me reste combien de temps à pouvoir vivre de mon métier?», rapporte Mme Kontoyanni.
Cette dernière a réagi à l’annonce de la création d’une actrice entièrement générée par l’intelligence artificielle, baptisée Tilly Norwood, une nouvelle qui a provoqué une levée de boucliers au sein de la communauté des acteurs de Hollywood.

«On est en train de nous voler»
Tania Kontoyanni dit avoir été étonnée de constater «à quel point ces annonces sont décomplexées».
«On nous dit de ne pas paniquer, que c’est juste un outil, que ce n’est pas là pour nous remplacer, mais on appelle quand même ça la nouvelle Scarlett Johansson. Ce n’est pas vrai que ce n’est pas là pour nous remplacer, ça nous remplace déjà dans les publicités, dans plein de contrats de voix.»
Elle rappelle que ces artistes synthétiques ont été créés grâce à l’usurpation du contenu, principalement celui généré par des influenceurs, acteurs et chanteurs, qui existe sur le web et avec lequel l’IA a été entraînée.
«On est en train de nous voler et de nous remplacer, en plein jour, au vu et au su de tous, sans aucun complexe», s’emporte Mme Kontoyanni.

Tout ça pourquoi? se demande-t-elle.
«En médecine, on peut penser à plein de choses qui aideraient le médecin humain à aller plus loin dans ses recherches et trouver d’autres façons d’aborder un problème de santé. Il y aurait un gain pour tous. Pour ce qui est de la culture, quel est le réel avantage de voir des œuvres artistiques où l’humain n’est pas impliqué? À part sauver de l’argent, nous ne voyons pas l’avantage. Par exemple, la machine ne saura jamais c’est quoi être mortel et laisser une œuvre pour la postérité.»
• Regardez aussi ce podcast vidéo tiré de l'émission de Benoit Dutrizac, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Les canaris dans la mine
La présidente de l’UDA affirme qu’il y a «un appétit» pour l’utilisation de l’intelligence artificielle au Québec, «mais pour l’instant, les producteurs ne sont pas équipés pour faire des artistes synthétiques, en ce sens que l’IA a été moins nourrie de notre contenu culturel».
Six syndicats représentant des artistes québécois ont néanmoins publié en juin un manifeste dans lequel il réclame aux gouvernements que l’intelligence artificielle soit encadrée.
Jusqu’à maintenant, leurs demandes sont restées lettre morte, se désole Tania Kontoyanni.
«On se sent tout seul sur la ligne de front. Nous sommes les canaris dans la mine depuis deux ans et tout ce qu’on entend de notre ministre de l’IA, c’est qu’il n’y aura pas de balises et de réglementation, mais du développement.»