«À sec au point de ne plus pouvoir flusher»: les demandes pour creuser des puits explosent au Québec
Même en cas d’urgence, il faut attendre entre 3 et 5 semaines pour obtenir de l’aide


Francis Pilon
Des puits à sec, des bateaux pris dans la boue et des champs desséchés: le Québec n’a jamais été aussi assoiffé. Le manque de précipitations depuis l’été cause des problèmes d’eau presque partout dans la province.
Les foreurs du Québec peinent à répondre à l’explosion des demandes pour creuser un puits chez des citoyens qui vivent parfois sans eau potable durant plusieurs semaines en raison de la sécheresse inhabituelle.
«Toute notre industrie est complètement ensevelie. On n’a jamais eu autant de nouvelles demandes de clients. On arrive à peine à répondre aux courriels et aux appels en détresse. J’ai vu une famille mardi avec deux enfants. Ils sont à sec au point de ne plus pouvoir flusher la toilette, imaginez», raconte au Journal Alexandre Samson, propriétaire de l’entreprise de forage Samson & Frères.

Ce dernier, qui est aussi président de l'Association des entrepreneurs en forage du Québec (AEFQ), affirme qu’il reçoit normalement une poignée d’appels chaque semaine pour creuser de nouveaux puits. Depuis le mois de septembre, ce nombre a grimpé à trois par jour.

«Les gens qui sont les plus touchés en ce moment par le manque de pluie, ce sont ceux qui ont des puits de surface ou de vieux puits qui sont moins profonds. Ils nous appellent en urgence pour forer un puits artésien qui est plus creux et apporte plus d’eau», explique M. Samson.
Du jamais-vu, en 25 ans
Le foreur Nicolas Bélanger, de la compagnie Camille Bélanger Inc. en Montérégie, affirme pour sa part recevoir quotidiennement jusqu’à cinq demandes pour obtenir un nouveau puits.
«Le problème, c’est surtout de répondre à toutes les demandes de gens qui capotent parce qu’ils sont à sec. Je n’ai jamais vu ça en près de 25 ans dans le domaine», soupire M. Bélanger.

Selon lui, l’heure est surtout grave pour les propriétaires de fermes qui manquent d’eau pour nourrir leurs animaux.
«On a aussi beaucoup d’appels de personnes qui vivent dans des maisons centenaires avec un puits n’ayant jamais manqué d’eau. Ils sont maintenant obligés de creuser un nouveau puits pour la première fois parce qu’on n’a plus de pluie», constate le foreur.
Un puits pour... 15 000$ à 20 000$
Alexandre Samson souligne que beaucoup de clients doivent s’endetter ou puiser dans leurs économies pour creuser un puits artésien ces jours-ci. L’expert estime que ce type de projet coûte en moyenne de 15 000$ à 20 000$ avec une pompe pour l’eau.
«Certains vont aussi refaire leur hypothèque carrément. Par contre, la personne qui vient de construire sa maison et qui est déjà endettée, ça peut accrocher. Surtout que ce n’est pas une dépendance qui est élégante et visible», lance avec ironie le président de l’AEFQ.
Il prévoit d’ailleurs que les pénuries d’eau risquent de s’aggraver au cours des prochaines années, surtout pour les propriétaires de puits de surface.
«Le phénomène qu’on vit cette année va se répéter de plus en plus, prévoit M. Samson. Avec les changements climatiques et les longues sécheresses, le sol devient trop dur et ça empêche l’eau de rentrer.»
