À propos du Vive le Québec libre: François Legault, ignare ou menteur?
Mathieu Bock-Côté
De passage en France, François Legault s’est distingué pour le pire en se permettant une ânerie «himalayesque».
Se prenant pour un historien, il s’est permis de réinterpréter le fameux «Vive le Québec libre», prononcé par le général de Gaulle du haut du balcon de l’hôtel de ville de Montréal, le 24 juillet 1967.
Citons-le, comme rapporté par la Presse canadienne: «Je pense que René Lévesque l’a pris au premier degré, c’est correct, mais c’était aussi pour dire le peuple, la nation québécoise doit s’affirmer dans le Canada».
Autrement dit, de Gaulle aurait moins dit vive l’indépendance que vive la liberté des francophones de s’affirmer dans le Canada. Je laisse de côté le fait qu’il se trompe sur la réaction de René Lévesque, et me concentre sur l’essentiel.
Histoire
Il y a deux possibilités.
La plus charitable d’abord: François Legault est un ignare. Il a la culture historique d’un raisin sec et se permet donc, involontairement, de déformer l’histoire en discourant sur un sujet qu’il ne maîtrise d’aucune manière.
C’est possible. J’ai souvenir de l’avoir entendu au micro de Guy Nantel incapable de nommer un seul des Patriotes pendus à la suite des rébellions de 1837-1838.
La moins charitable maintenant. François Legault a décidé de mentir ouvertement en recyclant le général de Gaulle à la sauce caquiste. Il le transforme en autonomiste partisan d’un nationalisme semi-croquant conforme au destin que la CAQ réserve aux Québécois dans le Canada.
La propagande caquiste dénature la vision du général de Gaulle en falsifiant l’histoire, sans égard pour la vérité, qu’on piétine allégrement. C’est-à-dire en mentant sans gêne.
Ce qui veut donc dire que sur ce sujet bien particulier, François Legault est un ignare ou un menteur.
Et il mérite une petite leçon historique. Je la lui donne volontiers. De Gaulle, en se rendant au Québec, en 1967, arrivait avec une mission bien claire: soutenir le mouvement d’affirmation nationale et la cause indépendantiste.
À ses proches, il avait confié son désir de dire «Vive le Québec libre», mais qu’il verrait s’il sentait la population prête pour cela. Au terme du Chemin du Roy, manifestement, il en était persuadé.
On ne revoit pas le magnifique documentaire consacré par Carl Leblanc à ce moment de notre histoire sans émotion.
Indépendance
Quelques mois plus tard, il confirmait, pour ceux qui en auraient douté, qu’à son avis, le Québec allait se constituer «en État souverain, comme le sont, de par le monde, tant et tant d’autres peuples».
Cette déclaration du général a fondé l’appui de la France au Québec lors des deux référendums, et encore aujourd’hui, porte une grande part de la classe politique française à soutenir l’indépendantisme de près ou de loin.
Et là, François Legault explique que nous nous trompons depuis 58 ans. François Legault, à Paris, s’est comporté en triste saboteur de son propre peuple. Il nous a fait honte.