L'expertise d'une cidrerie québécoise à la rescousse des poiriers chinois

Geneviève Quessy
Sollicitée pour son expertise en matière de fabrication de cidre, une entreprise de la Montérégie contribuera à la sauvegarde de la culture de la poire en Chine, une industrie millénaire pour laquelle ce pays cherchait un débouché.
Robert McKeown, copropriétaire avec sa conjointe, Andrée St-Denis, de la cidrerie de Rougemont qui porte son nom, n’en revient pas encore d’être partenaire dans cette aventure.
«Un jour de 2017, une dame chinoise nommée Huanmei Hao m'a écrit pour m'inviter en Chine. Je pensais que ce n'était pas sérieux, puis j'ai réalisé que ça l'était! Ils cherchaient un expert qui pourrait les conseiller en matière de fabrication du cidre, dans le but de valoriser une production de poires pour laquelle la consommation est en déclin», raconte M. McKeown, dont la cidrerie, l'une des plus importantes au Québec, produit du cidre à partir des fruits de son verger.

Robert McKeown a décidé d'embarquer dans le projet. «Quand je suis arrivé à l'aéroport, des représentants du gouvernement m'ont accueilli et m'ont fait visiter les vergers de la région de Wei, capitale chinoise de la poire, où se trouvent des poiriers vieux de plus de 1000 ans. Les caméras nous suivaient, tout le monde m'observait goûter, c'était comme dans l'émission «La petite séduction»!»
Le savoir-faire millénaire qu'il y a découvert a impressionné le cidriculteur. «Tout se fait à la main là-bas. Ils pollinisent les fleurs des poiriers une après l'autre avec des cotons-tiges, et enveloppent chaque poire avec un sac pour les protéger. Ça donne de très gros fruits.»
Puis au terme d'un séjour d'une semaine, M. McKeown a demandé aux responsables chinois ce qu'ils attendaient de lui, au juste. «Ils m'ont répondu «Tout! Tout ce que vous voulez!»

Leur objectif était de trouver un débouché pour leur production de poires en faisant du cidre. Je me suis rendu compte qu'ils manquaient de connaissances en matière de levure, ingrédient utilisé pour convertir le sucre naturel des fruits en alcool. Utiliser une expertise et une marque de commerce étrangère allait selon eux donner plus de crédibilité aux produits, car le cidre chinois n'est pas bien vu dans son pays.»
Le projet a pris forme, au fil de négociations supportées par des traducteurs. «On a créé une entreprise qui s'appelle McKeown China, dont je suis propriétaire à 15 %. Le but est de commercialiser du cidre de poire et de pomme à l'intention du marché chinois, sous la marque de commerce McKeown», dit Robert McKeown.

Une usine vient d'être construite à Ji'an, dans la province du Jilin. À terme, l'objectif de McKeown China sera de produire 10 millions de litres de cidre par année. «Pour l'instant, je travaille à distance à cause de la pandémie, ce qui complique un peu les choses. Récemment, on a fait des essais à petite échelle et maintenant on teste le nouvel équipement pour produire en plus grosse quantité.»
Les premières cannettes de cidre de McKeown China, portant le même logo que celles vendues au Québec, à quelques détails près, devraient être commercialisées sur le marché chinois dès cet été, espère Robert McKeown.
