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L'article provient de Le Journal de Montréal
Monde

À Gaza, des enfants pleurent leur père «tué pour un bout de pain»

AFP
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2025-06-02T17:21:36Z
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Un dernier baiser au milieu des cris et des sanglots. Les filles d'Hossam Wafi disent adieu à leur père, dont la dépouille est déjà dans un sac mortuaire, sur le perron de l'hôpital Nasser à Khan Younès. 

«Papa, papa», crie l'une des plus jeunes en s'accrochant aux grilles de l'hôpital, entourée par ses sœurs qui peinent à reprendre leur souffle entre les larmes.

Une petite foule s'agite autour d'elles, des dizaines de personnes sont venues pleurer ce père de six enfants, tué dimanche alors qu'il tentait de se procurer de la farine pour nourrir sa famille, dans le sud de la bande de Gaza.

«Il est parti chercher de quoi manger pour ses filles et quand il est revenu, il était mort», raconte sa mère, Nahla Wafi, le visage déformé par le chagrin.

Le fils qu'elle a perdu ce jour-là fait partie des 31 personnes tuées alors qu'elles tentaient d'atteindre dimanche un centre de distribution de colis alimentaires, selon la Défense civile de Gaza.

L'armée israélienne, qui poursuit son offensive contre le Hamas, a nié avoir tiré sur des civils qui se trouvaient à proximité ou à l'intérieur de ce site géré par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au fonctionnement opaque soutenue par les États-Unis et Israël.

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Un porte-parole de la GHF a également nié tout incident.

Mais plusieurs sources médicales, dont le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), ont déclaré avoir reçu dimanche de très nombreux blessés dans le sud de Gaza, tout en précisant que ces personnes souffraient souvent de blessures par balle et avaient dit s'être trouvées aux abords de la distribution d'aide.

«Pour un bout de pain» 

«Ils l'ont tué», affirme une proche de la famille présente à l'hôpital Nasser.

«On parle d'aide, on nous dit ‘’venez prendre cette aide’’, mais alors pourquoi tuer les gens?», poursuit-elle, en expliquant que les enfants autour d'elle n'ont rien à manger.

À l'extérieur de l'hôpital, des hommes s'alignent en silence pour accomplir la Salat al-Janaza, cette prière ultime récitée debout, sans se prosterner, pour les défunts.

Au deuxième rang, l'oncle d'Hossam Wafi, Ali Wafi, se mord la lèvre pour retenir ses larmes.

«Il est parti pour un bout de pain, pas pour autre chose», s'emporte-t-il plus tard, «il voulait juste nourrir ses enfants».

Cet homme aux courts cheveux blancs critique le chaos régnant autour des nouvelles distributions alimentaires.

Les gens «vont là-bas et se font bombarder – frappes aériennes, chars, tirs d'artillerie – tout ça pour un morceau de pain!»

Bousculades 

Le bureau des Nations unies pour les affaires humanitaires (Ocha) a publié dimanche une vidéo tournée à proximité d'un des sites de distribution dans le centre de Gaza.

Les images montrent une foule désordonnée se pressant autour de quatre couloirs délimités par des grilles métalliques au milieu de ce qui ressemble à un terrain vague, entouré au loin par des ruines d'immeubles. Certains agents de sécurité, se tenant à proximité de véhicules blindés, s'adressent en anglais aux Palestiniens.

Le site de distribution s'étend entre des monticules de terre et de sable. On voit, toujours sur la même vidéo, des personnes s'y bousculer, et une femme raconte plus loin s'être fait voler son colis.

Certains passants ont le regard hagard, d'autres semblent fébriles.

La situation humanitaire est désastreuse dans la bande de Gaza, où un blocus de plus de deux mois, partiellement assoupli la semaine dernière, a aggravé les pénuries de nourriture, de médicaments et d'autres biens de première nécessité.

Évoquant ces scènes de désespoir, Ali Wafi lâche, excédé: «C'est ce qui est arrivé au peuple palestinien. Voilà où on en est arrivés!»

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