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L'article provient de Le Journal de Montréal
Culture

«Les filles, on est bonnes partout»: Janette Bertrand veut que les jeunes se souviennent du combat pour l'égalité des sexes

©Julien Faugère / Éditions Libre Expression
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Photo portrait de Marie-France Bornais

Marie-France Bornais

2023-10-26T22:55:00Z
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À 98 ans, toujours aussi énergique, ouverte sur le monde, curieuse de tout, généreuse et fabuleusement «allumée», Janette Bertrand a revisité son autobiographie Ma vie en trois actes, publiée en 2004. Relisant tout, prenant des notes, réfléchissant sérieusement, elle a revu à travers son «roman de vie» près d’un siècle d’histoires des femmes et un grand pan de l’histoire de la société québécoise. Rien n’échappe à Janette et elle partage dans ce livre ses perceptions sur la société actuelle. Son souhait: que les jeunes s’emparent de cette nouvelle édition, qui sort demain en librairie, et la lisent avec attention.  

Dans Ma vie en trois actes, Janette Bertrand raconte son histoire, de son enfance dans le «faubourg à m’lasse» jusqu’à ses 70 ans. En parallèle, elle rappelle avec passion l’histoire des femmes de son siècle: leurs luttes, leurs victoires, leurs défis. 

Dans cette nouvelle édition de Ma vie en trois actes se trouve une photographie d’un «charm bracelet» offert par son premier mari, il y a longtemps. Les breloques étaient censées représenter ses aspirations: une paire de ciseaux, un balai Bissel, un berceau, un cœur, un agenda, une poêle à frire. Elle l’a jeté à la poubelle.

«Écoute... c’est-tu extraordinaire, le chemin qu’on a fait? En peu de temps», commente-t-elle en entrevue téléphonique, quelques minutes après le tournage d'une émission qui sera diffusée dans le temps des Fêtes. «On parle de la Révolution tranquille, mais il y a aussi eu la Révolution des femmes. Évidemment qu’il n’y a pas eu de sang. Ça a été une révolution plus que tranquille. Mais sans même se consulter, on s’est révoltées.»

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La nouvelle édition du livre Ma vie en trois actes compte des préfaces signées Léa Clermont-Dion et Guy A. Lepage.
La nouvelle édition du livre Ma vie en trois actes compte des préfaces signées Léa Clermont-Dion et Guy A. Lepage. Marie-France Bornais

«Il faut que ce livre soit mis entre les mains des jeunes gens, pour qu’ils sachent d’où ils viennent, qu’ils ne prennent pas pour acquis tout ce qui leur arrive», ajoute-t-elle. 

Janette Bertrand suit l’actualité et observe attentivement ce qui se passe dans la société contemporaine, ici et ailleurs. «Il pourrait y avoir des reculs, alors qu’on a tellement travaillé à ce qu’on soit quasiment à l’égalité. Les filles, on est bonnes partout alors qu’on nous disait qu’on n’était bonnes qu’à faire des petits.»

Janette Bertrand trouve qu’elle était représentative de toutes ces femmes qui voulaient ne pas être «rien qu’une fille». «J’ai été élevée pour être ménagère. Je me disais: je peux être ménagère, mais je peux être d’autre chose aussi. C’est ça que j’ai fait. C’est un livre en hommage à l’évolution des femmes, qui est allée très vite, sans sang répandu.»

Fière des jeunes pères

Ce qui la rend le plus fière, en ce moment? «C’est qu’en ce moment, les jeunes pères viennent de découvrir la paternité. Avant, ils n’étaient que pourvoyeurs. Les enfants, c’était à leurs femmes. Moi, j’ai des petits-fils de 40 ans qui ont des amis et ce sont tous des pères extraordinaires.»

«J’espère qu’ils vont découvrir le plaisir qu’il y a à vivre avec une femme, à égalité. C’est pas une compétition, c’est une complétude. Il y a encore des hommes qui trouvent qu’on prend leur place. Mais il faut qu’ils avancent», note Janette.

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«Les hommes ont pris beaucoup de retard parce qu’ils ne prenaient pas au sérieux qu’on allait être des bonnes financières, des bonnes députées. Ils pensaient qu’on serait des bonnes mères, comme ça a été pendant 8000 ans. On demande l’égalité.»

Bientôt 100 ans

Janette Bertrand ajoute que cette nouvelle édition prépare l’arrivée de son prochain livre, qui sera publié pour ses 100 ans. «Le 4e acte, c’est toujours la fin!», dit-elle avec son rire tellement communicatif. «Je vais raconter ce qui m’est arrivé depuis mes 70 ans jusqu’à mes 98 ans. Et beaucoup aussi ce que ma vie m’a appris. Et ce que je veux transmettre.»

Bientôt 100 ans... «Je ne pensais me rendre là. Et de travail en travail, je suis rendue là. Et ça, c’est grâce à ma tête, qui est intacte, qui est comme avant. C’est le plus grand des bonheurs.»


Ma vie en trois actes, réédition

Janette Bertrand

Préfaces de Léa Clermont-Dion et Guy A. Lepage

Éditions Libre Expression

480 pages


  • Grande communicatrice et autrice prolifique, Janette Bertrand a écrit des articles de journaux, des romans, des essais, de nombreuses dramatiques pour la télévision.
  • Elle a créé et animé plusieurs émissions visant à faire tomber les préjugés et les tabous.
  • Elle a reçu de nombreux prix et distinctions, dont le prix Hommage Guy Corneau 2021.
  • Elle participe à un projet pour la Fondation de l’Institut de gériatrie de Montréal, «Les Aînés, en manque de modèles». Pour en savoir plus : figm.ca


«Je veux m’instruire comme mes frères, faire mon cours classique comme eux, mais je dois obéissance à mes parents.
[ Aujourd’hui, je me vante d’être désobéissante. D’ailleurs, l’obéissance
telle que je l’ai connue a presque disparu, parce que les parents
communiquent beaucoup plus avec leurs enfants. ]
L’obéissance ! Les enfants doivent obéir à leurs parents,
comme les parents doivent obéir à l’Église. Les parents
savent ce qui est bon pour leurs enfants. L’Église sait ce
qui est bon pour les parents. Je veux briser ce cercle et
plaide ma cause auprès de papa, mais il ne comprend pas.
— Un cours classique ? Pour changer des couches !
Bâtard, ti-fille, t’as pas besoin de ça !»
- Janette Bertrand, Ma vie en trois actes – Réédition, Éditions Libre expression

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