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L'article provient de Le Journal de Montréal
Société

À 38 ans, elle choisit l’aide médicale à mourir

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Photo portrait de Axel  Tardieu

Axel Tardieu

2025-06-20T21:00:00Z
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Atteinte de fibrose kystique depuis l’adolescence, Anissa Catherine Doplihar a pris la décision de recourir à l’aide médicale à mourir (AMM). À 38 ans, elle fait partie d’une minorité: les 18-39 ans ne représentent que 2% des cas d’AMM au Québec.

Dans l’intimité de sa chambre des soins palliatifs, à l’Hôtel-Dieu de Sherbrooke, Anissa Catherine Doplihar nous accueille avec sérénité. Elle a passé les derniers jours le crayon à la main ou la guitare entre les bras, entourée de ceux qu’elle aime.

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D’ici trois jours, elle recevra l’aide médicale à mourir. «Mon état allait continuer à dégénérer jusqu’à ce que mort s’ensuive. En ce moment, j’ai à peine l’énergie pour me laver et m’habiller moi-même», confie-t-elle avec franchise.

Paradoxalement, depuis l’acceptation de sa demande, en janvier, la vie a repris ses droits, explique-t-elle.

«Je me suis remise à rire et à vivre depuis que je sais que je vais mourir, bizarrement», révèle-t-elle.

Diagnostiquée à l’adolescence

Adolescente, Anissa Catherine apprend qu’elle souffre de fibrose kystique, cette maladie qui s’attaque impitoyablement aux poumons et au pancréas. On lui prédit alors une espérance de vie d’environ 40 ans.

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Les années suivantes confirment ce pronostic. Chaque jour, respirer devient plus difficile. Son autonomie s’effrite. Les souffrances physiques et psychiques deviennent insoutenables.

Pascal Doplihar et sa fille Anissa Catherine Doplihar.
Pascal Doplihar et sa fille Anissa Catherine Doplihar. Photo Agence QMI, AXEL TARDIEU

Depuis 2015, l’aide médicale à mourir est légale au Québec pour les personnes majeures atteintes d’une maladie grave et incurable éprouvant des souffrances persistantes et insupportables. La fibrose kystique répond à tous ces critères.

«Quelqu’un qui a 18 ans et un cancer en phase avancée, en fin de vie, peut l’avoir. Quelqu’un avec une fibrose kystique en phase terminale peut l’avoir, même à 19 ans, parce que c’est une maladie mortelle», explique le docteur David Lussier, gériatre à l’Institut universitaire de gériatrie de Montréal.

Entre avril 2023 et mars 2024, 5717 personnes ont reçu l’AMM au Québec, qui détient le record mondial. Les 18-39 ans ne représentent que 2% des cas, la moyenne d’âge étant de 76 ans.

«Ce qui est logique, puisque plus on avance en âge, plus on est à risque d’être malade», souligne Georges L’Espérance, président de l’Association québécoise pour le droit de mourir dans la dignité.

L’accompagnement d’un père

Anissa Catherine se dit «chanceuse» de pouvoir bénéficier du système québécois, qui lui permet de choisir son destin. Son père, Pascal, a appris à accepter ce choix, malgré la tristesse.

Pascal Doplihar, père d’Anissa Catherine Doplihar
Pascal Doplihar, père d’Anissa Catherine Doplihar Photo Agence QMI, AXEL TARDIEU

«Depuis 25 ans, j’ai fait beaucoup de petits deuils. On le sait, que ça ne s’améliorera pas, donc la décision est moins contestable. Elle est prête, ça se voit dans son discours», confie-t-il.

«Pour moi, c’était inconcevable de vivre malade», assure sa fille.

Dimanche dernier, jour de la fête des Pères, entourée de ses proches, Anissa Catherine a reçu l’aide médicale à mourir. Un départ choisi dans la dignité.

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