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L'article provient de Le Journal de Montréal
Opinions

5% du budget à la défense. Sommes-nous en train d’exagérer?

Serions-nous en train de passer d’un extrême à l’autre?

Capture d'écran/TVA Nouvelles
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Photo portrait de Mario Dumont

Mario Dumont

2025-06-27T04:00:00Z
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Le Canada a négligé ses forces armées, c’est un fait. Le Canada était lourdement en défaut par rapport à ses obligations devant l’OTAN, c’est vrai. Je me suis donc réjoui lorsque Mark Carney a annoncé un coup de barre rapide pour que le Canada atteigne enfin cette fameuse cible de 2% du PIB.

Mais là, les choses s’accélèrent. Le premier ministre du Canada s’est maintenant engagé à ce que le Canada investisse 5% de son PIB dans la défense. Il l’a fait dans un consensus des pays de l’OTAN réunis cette semaine.

La décision semble être acceptée comme une évidence, une nécessité. Pas de temps pour l’analyse. On comprend un sous-entendu: «Nous en sommes rendus là». Parce que nous vivons dans un monde plus dangereux et instable, parce que les États-Unis sont devenus un allié trop imprévisible, il faut ce qu’il faut.

Je me permets de poser quelques questions. Je suis loin d’être un pacifiste de type fleur bleue qui s’oppose systématiquement aux investissements en défense. J’ai ouvertement souhaité le rattrapage pour l’armée canadienne. Mais est-ce vraiment sage et judicieux d’investir cet énorme 5% de la richesse nationale d’un pays dans la défense?

Précisons que le 5% doit être nuancé parce que le dernier 1,5% peut être investi dans des recherches ou des infrastructures qui ne sont pas exclusivement militaires. Malgré cette nuance, l’augmentation est drastique. Dans le cas du Canada, avez-vous fait le calcul des milliards supplémentaires qu’il faudra investir?

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Tripler? Quadrupler?

Le budget de la défense était de 30 milliards $ l’an dernier. Pour respecter l’objectif, il faudrait le faire grimper entre 120 et 140 milliards $. D’ici 2035, en une dizaine d’années... Est-ce raisonnable pour un pays qui n’est pas en guerre de tripler, voire de quadrupler son budget de défense en moins de quinze ans?

Cela soulève plusieurs questions. D’abord d’où viendra ce nouvel afflux de milliards? Désolé, il n’y a que trois options. Des emprunts qui s’ajoutent à la dette du Canada. De nouveaux impôts dans un pays où nous en payons déjà une claque. Ou des déplacements budgétaires en allant diminuer les allocations aux autres missions de l’État.

Ce qui amène la question des priorités. Dans un scénario semblable, il y a fort à croire que la défense deviendrait une dépense plus grosse que les transferts en santé aux provinces par exemple. Le ministère de la Défense aurait un budget hautement supérieur à tous les autres ministères. C’est un choix... peut-être pas le bon.

Gaspillage?

Et admettons qu’on accepte ce niveau de dépenses militaires comme étant nécessaire, il reste une grande question: comment cet argent sera-t-il dépensé? Le Canada a une performance exécrable en matière d’achats militaires. On hésite, on signe un contrat, on change d’idée, on paye deux fois le prix.

Il n’y a rien dans l’historique récent des approvisionnements militaires canadiens qui puisse nous donner confiance qu’un influx massif et subit d’argent public ne deviendra pas une foire de gaspillage.

Matière à réflexion...

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