43 pays et îles touchés: les Caraïbes menacées par des quantités records de sargasses


Vincent Desbiens
Les vacances de millions de touristes sont affectées par des quantités astronomiques de sargasses dans les destinations soleil des Caraïbes, du Mexique et de la Floride. Selon une experte, le record pour la masse totale des arrivages de cette algue nauséabonde est en voie d’être pulvérisé en 2025.
D’après Sargassum Monitoring, une organisation non gouvernementale qui répertorie les vagues de sargasses sur les plages des tropiques, des amoncellements d’environ 40 millions de tonnes métriques ont été observés en haute mer entre l’Amérique et l’Afrique.
Des chiffres qui ont fait écarquiller les yeux de sa présidente et fondatrice, Christine Jimenez-Mariani, puisque le précédent record en la matière avait été établi en 2022 avec environ 24 millions de tonnes métriques.

«Ça ne veut pas dire que la quantité qui va toucher terre sera plus grande, mais c’est la saison de tous les records pour l’accumulation, fait-elle valoir. On touche des zones qui n’avaient que très rarement été atteintes par la sargasse. Toutes les destinations sont aux prises avec cette problématique cette année. C’est pratiquement impossible d’y échapper.»
Un «rempart»
Les témoignages concernant des plages envahies par cette algue nuisible qui dégage une odeur d’œufs pourris lorsqu’elle se décompose au soleil sont légion sur les réseaux sociaux depuis le début du mois de juin.
Marc-André Poulin, un Québécois en vacances à Punta Cana, n’a pas pu mettre le pied à l’eau depuis son arrivée à l’hôtel, dimanche dernier. Ce n’est pas la première fois qu’il se rend en République dominicaine en été et il affirme ne «jamais avoir rien vu de pareil».

«Il y a un rempart d’un mètre de haut par un mètre et demi de profondeur sur toute la longueur de la plage, déplore-t-il. Ça arrive sans arrêt. C’est impossible d’aller dans la mer et l’odeur est infernale. Tout le complexe passe son temps à la piscine.»
43 pays
Christine Jimenez-Mariani est une expatriée française arrivée sur la côte du Mexique en 2013. Elle a donc été aux premières loges de l’arrivée massive du phénomène, qui n’a fait qu’empirer dans les 10 dernières années.
«Quand j’ai lancé Sargassum Monitoring, il n’y avait que sept ou huit pays qui étaient touchés par la sargasse. Cette année, on en compte 43», constate-t-elle.

Navigatrice ayant parcouru l’Atlantique à plusieurs reprises sur son voilier, elle a décidé en 2018 de s’intéresser à ces mystérieux végétaux qui, à chaque détachement, font passer l’eau turquoise et cristalline de la Riviera Maya à un brun trouble.
«Il n’existait aucune ressource pour s’informer des arrivages de sargasses. J’ai contacté plusieurs universités qui effectuent des recherches en la matière et on collabore depuis pour les étudier, les cartographier et les répertorier.»
Imprévisible
Si les chercheurs sont en mesure d’affirmer que le réchauffement climatique contribue à la prolifération des sargasses, il demeure toutefois impossible d’en prévoir précisément les déplacements, comme c’est le cas pour une tempête tropicale ou un ouragan, par exemple.
«On a des images satellites, mais avec les vents changeants, les courants et les conditions, ça crée d’énormes variations. On ne sait pas quand il peut y avoir un détachement ni la direction qu’il prendra», conclut Christine Jimenez-Mariani, en invitant les voyageurs à documenter les mouvements d’algues du golfe et à les transmettre à Sargassum Monitoring.