«Quand j’ai appris qu’il y aurait encore trois jours de grève cette semaine, j’ai pleuré»: des parents excédés après 11 jours de conflit en CPE
Les jours de grève dans 400 CPE au Québec touchent environ 50 000 enfants
Amanda Moisan et Anouk Lebel
Proches épuisés de garder, horaires chamboulés et de gros montants perdus; des parents sont excédés au terme d’une 11e journée de grève dans 400 centres de la petite enfance.
«Quand j’ai appris qu’il y aurait encore trois jours de grève cette semaine, j’ai pleuré. Je suis vraiment à boutte», laisse tomber Virginie Jasmin.
La mère de trois enfants de Saint-Norbert-d’Arthabaska, dans le Centre-du-Québec, a une nouvelle fois dû se mettre en mode solution pour faire garder les deux plus jeunes de 18 mois et 4 ans.
«J’ai une amie qui est capable de prendre le relais, mes parents le font parfois, mais ils travaillent. On sent un épuisement», dit l’intervenante sociale en faveur de meilleures conditions de travail pour les travailleuses.
Les éducatrices en CPE affiliées à la Centrale des syndicats nationaux (CSN) seront en grève jusqu’à mercredi, ce qui affecte 50 000 enfants de 400 CPE.
• Écoutez aussi cet épisode balado tiré de l'émission de Mario Dumont, diffusée sur les plateformes QUB et simultanément sur le 99.5 FM Montréal :
Casse-tête
Rencontrée lundi au parc Jarry à Montréal, Odile Lemay profitait du soleil avec ses deux enfants. Cette mère de 35 ans jongle depuis le 23 janvier avec un calendrier de garde improvisé.
«C’est chacun notre tour, moi le lundi, mon conjoint mardi et mamie mercredi. Par moments, c’est même d’apporter les enfants au travail pour mon conjoint», explique-t-elle, surveillant du coin de l’œil sa fille de 5 ans et son fils de 3 ans et demi.

Installée plus loin, Mireille Des Groseillers, mère d’un garçon de 19 mois, peut compter sur un réseau familial élargi.
«Les grands-parents viennent beaucoup aider, sinon on a besoin de relève avec nos frères et sœurs qui peuvent venir nous aider quand ils ne travaillent pas. C’est beaucoup d’organisation», dit la maman de 32 ans.

800$ en moins
À Cap-Saint-Ignace, près de Montmagny, Vanessa Coulombe ne peut pas compter sur les grands-parents pour garder ses enfants de 6 mois, 2 ans et 4 ans.
«Ma mère travaille encore et les parents de mon conjoint aussi. Nos employeurs sont compréhensifs, mais ç’a un impact sur nos paies», dit la mère de quatre enfants, qui travaille sur une chaîne de production.
Elle calcule que les journées de travail perdues représentent 800$ en moins dans le budget familial, juste pour cette semaine.
Offrir son aide
Des citoyens comme Suzanne Carpentier ont voulu tendre la main aux parents qui auraient besoin d’aide. La femme de 67 ans, qui est retraitée du domaine de la petite enfance, a fait un appel sur les réseaux sociaux pour offrir ses services aux familles de Boucherville.
«Plusieurs personnes ont des mères, des grands-mères ou des tantes proches qui peuvent aider, mais combien de personnes n’ont pas cette chance-là?» se questionne la mère de cinq enfants et grand-mère de trois petits-enfants.

«C’est de l’incertitude pour plein de parents, parce que ça peut durer plus longtemps que prévu. Je ne fais pas ça pour l’argent, je veux juste offrir de l’aide aux mamans qui chercheraient une gardienne», ajoute-t-elle.
Si plusieurs familles peuvent compter sur un réseau autour d’elles, ce n’est pas le cas pour tout le monde. Stéphanie Lanquetin doit s’occuper de ses fils de 3 mois et 4 ans.
«Je suis en congé de maternité, donc je ne rate pas de travail, mais c’est demandant. Pour le moment, ça va, mais si ça dure plus longtemps, il faut d’autres options», explique la maman de 40 ans.

La possibilité d’une grève générale illimitée n’est toujours pas écartée pour ces éducatrices en CPE.
Les négociations se poursuivent, alors que les désaccords persistent concernant les salaires, le fardeau des tâches, les primes pour les travailleurs dans les régions et l’aide pour les enfants ayant des besoins particuliers.