1% des dépenses de l’État à la construction de logements sociaux

Martin Bécotte, Directeur du développement et partenariats, Fédération régionale des OSBL d’habitation de la Montérégie et de l’Estrie
Depuis 2018, le gouvernement du Québec a dépensé 9 milliards de dollars pour réduire les taxes scolaires. Cette mesure constitue aujourd’hui la plus importante dépense en habitation du gouvernement du Québec. Elle représente à elle seule 1% des dépenses annuelles de l’État.
Or, cette mesure favorise principalement les ménages les plus riches et les propriétaires immobiliers dans les grands centres urbains. Elle profite aussi davantage aux hommes, qui possèdent 30% plus d’actifs et gagnent 20% de plus que les femmes. Mon propre ménage en bénéficie, avec plusieurs centaines de dollars d’économies annuelles, alors que la valeur de notre résidence a doublé en cinq ans.
Selon Le Journal de Montréal, le ministre des Finances a lui-même économisé 3500$ par année, tandis que la famille Desmarais a bénéficié d’une réduction de 111 000$ pour son domaine à Charlevoix.
Réduire les coûts
Avec ces 9 milliards, le Québec aurait pu construire minimalement 25 000 logements sociaux. Durant les 10 prochaines années, le gouvernement du Québec dépensera 16 milliards en réduction des taxes scolaires.
Depuis 2018, le gouvernement a dépensé 1,6 milliard $ pour la construction de 9000 logements sans but lucratif et pour l’amortissement de ceux construits au cours des 15 dernières années.
Au cours des 10 dernières années, le milieu de l’habitation communautaire et sociale a été convié à de nombreux colloques, échanges, consultations gouvernementales, rencontres pour réinventer le modèle et trouver une façon de réduire les coûts et d’en faire plus avec moins, pendant que le gouvernement dépensait 1 million $ par chambre dans les maisons des aînés.
Choix politique
La mesure la plus innovante des 10 dernières années, celle de construire 11 immeubles de 100 logements avec les mêmes plans et devis dans différentes municipalités, a demandé 235 millions d’argent public ainsi que des donations de terrain et une réduction de taxe des 11 municipalités ciblées. Le projet a également pu compter sur une fondation elle-même financée par des fonds publics.
La crise actuelle détruit des vies, nos communautés et l’économie du Québec. Il est urgent de construire et de pouvoir compter sur un financement ambitieux et prévisible à long terme afin de permettre à d’importants développeurs communautaires de construire des dizaines de milliers de logements. Mais également, pour permettre aux petits organismes de continuer leur développement enraciné dans les communautés, avec une forte implication de bénévoles et de locataires.
La réduction des taxes scolaires nous a démontré que les moyens financiers pour construire des logements sont un choix politique.
Allouer 1% des dépenses de l’État à la construction de logements sociaux transformerait durablement la qualité de vie des Québécois et l’économie, réduirait les coûts en santé, l’itinérance et notre consommation d’énergie. Le succès de projets financés par l’Initiative canadienne pour la création rapide de logements (ICRL) le confirme: lorsque le financement est important et simple, des projets voient rapidement le jour. Une étude de l’Association des groupes de ressources techniques (AGRTQ) publiée le 13 mai démontre que des investissements en logements sociaux rapportent un retour sur investissement de 138% au gouvernement du Québec.
Le milieu de l’habitation communautaire doit continuer de soulever chaque pierre à la recherche d’innovation. Mais ce qui est urgent de gagner maintenant, c’est un engagement clair et durable des gouvernements du Québec et du Canada à investir massivement dans le logement social et sans but lucratif.

Martin Bécotte
Directeur du développement et partenariats
Fédération régionale des OSBL d’habitation de la Montérégie et de l’Estrie